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Ma petite question à moi


La tolérance au changement, ça s’apprend. Même après une trentaine d’années de pratique, ce n’est pas chose facile! Des transitions, j’en ai eu plusieurs dans les dernières années. Et qui dit transitions, dit insécurité, questionnements. La maternité, ça change une vie qu’on dit? Je ne veux tellement pas prendre de mauvaises décisions quand il s’agit de mes enfants. Je les aime tellement! Mais des questionnements, j’en ai. Tous les jours. Et des décisions, j’en prends. Tous les jours. Des bonnes, et des moins bonnes. En période de transition et d’insécurité, quand on trouve une façon de toujours nous ramener à l’essentiel, on s’y colle. Moi, j’ai ma petite question à moi. Toute banale. Je vous avertis, elle n’a rien d’extraordinaire, mais elle me suit, me rassure. Je vous la partage, bien humblement: “Et on faisait quoi, il y a des milliers d’années?”

Tout d’abord, il y a eu l’environnement. Amoureuse de la nature, j’ai toujours chercher à la laisser intacte, à la préserver. Quand on devient un adulte indépendant, ce sont nos choix qui ont un impact sur notre planète. Je me suis donc questionnée. Comment faire pour diminuer mon empreinte? Ma petite question m’a aidé, et m’aide encore. “Et on faisait quoi, il y a des milliers d’années?” On vivait en harmonie avec la nature, on la respectait. On utilisait le strict minimum, on réutilisait, on transformait, on disposait avec soin des restes de nourriture afin que mère Nature les retourne rapidement à la Terre, on faisait nous-mêmes, local. Alors, c’est ce que je tente de faire dans mes choix de consommatrice. J’achète moins, mais mieux. Je réutilise. Je recycle. Je composte. Je fais maison, local.

Puis je suis devenue maman. Ce qu’il y a de plus beau dans la maternité, c’est que l’amour inconditionnel que j’éprouve pour mes enfants m’a changée, pour le mieux je crois! J’ai eu tant de questionnements que j’ai dû évoluer et grandir en même temps que mes enfants. Et ma petite question à moi était là, toute petite, mais criante de vérité.

Tout d’abord, quand Cocotte est arrivée, elle pleurait beaucoup. Elle s’endormait souvent au bout de ses pleurs, exténuée, et moi le coeur en miettes. On m’a dit de la laisser pleurer, qu’elle s’habituerait. Mais je n’arrivais pas à me convaincre que c’était ça la solution. “Et on faisait quoi, il y a des milliers d’années?” On portait nos enfants, on les consolait. Jamais on n’aurait laissé pleurer un bébé seul. Le risque qu’un prédateur le repère aurait été trop grand. Alors j’ai porté ma Cocotte, je l’ai consolée. Et j’ai découvert qu’elle était intolérante aux produits laitiers.

Ouf. Ça je ne m’y attendais pas. Mon désir d’allaiter était toujours là, aussi fort. En fait, c’était plus qu’un désir, c’était une nécessité. Mais je m’inquiétais. Est-ce que je manquerais de quelque chose si je coupe tous les produits laitiers et le lait? Encore pire, est-ce que Cocotte manquera de quelque chose? “Et on faisait quoi, il y a des milliers d’années?” On ne consommait pas de lait de vache sous aucune forme, ni de lait d’aucune autre espèce animale. On allaitait nos enfants jusqu’à ce qu’ils décident d’eux-mêmes que c’était terminé. Alors, j’ai coupé les produits laitiers et j’ai allaité. Longtemps.

Puis, nous sommes déménagés. Une fois dans notre nouveau nid, ça m’a frappé. Comment est-ce que je pouvais m’attendre à ce que Cocotte se sente en sécurité la nuit, toute seule, dans un endroit qu’elle ne connaissait pas? “Et on faisait quoi, il y a des milliers d’années?” On dormait tous ensemble, jusqu’à ce que les enfants partent vivre leur propre vie. Alors le lit conjugual est devenu le lit familial. Et ça semblait si naturel. La place de Cocotte avait toujours été là, avec nous. Jour et nuit.

Cocotte a grandi, Ti-Loup est arrivé. Intolérant aux protéines laitières, comme sa soeur. Intolérant aux oeufs, comme papa. J’ai appris que la première cause de réchauffement de la planète était l’industrie du bétail. J’ai appris que si on continuait de pêcher massivement dans nos océans, ils seraient vides, d’ici trente ans. Est-ce qu’on manquera de quelque chose si on se prive de tout ça? “Et on faisait quoi, il y a des milliers d’années?” On mangeait peu de viande. L’alimentation était majoritairement basée sur les fruits et les plantes. On a décidé de plonger dans quelque chose qui nous était tout à fait inconnu. Ensemble. On a décidé de changer notre alimentation pour protéger notre planète. Pas de lait. Pas d’oeufs. Pas de viande.

Cocotte a vieilli. Elle est curieuse. Elle veut tout savoir sur ce qui l’entoure. Savoir comment ça fonctionne. Connaître toutes les limites. Je l’aime tant. Mes attentes sont hautes. Comment l’amener à devenir la personne exceptionnelle que je sais qu’elle a le potentiel de devenir, tout en lui montrant que certaines limites sont infranchissables? “Et on faisait quoi, il y a des milliers d’années?” On vivait ensemble. On montrait par l’exemple. On discutait. On comprenait que nos enfants étaient en apprentissage. Alors j’ai choisi d’essayer de ne pas punir. De ne pas menacer. De ne pas crier.

L’amour, c’est notre meilleur guide. La société moderne, dans tout ce qu’elle a de scientifique, d’économique et d’individualiste nous a fait oublier notre instinct. Elle nous a fait oublier ce que nous savions faire de mieux il y a des milliers d’années, sans l’aide de livres et d’études. Vivre en harmonie avec notre planète. Être parent. Aimer nos enfants. Leur montrer comment être des adultes autonomes qui sauront aimer à leur tour, inconditionnellement. Être parent, ça ne s’apprend pas qu’on dit. Non, être parent, c’est être humain. Et être humain, c’est dans notre sang, c’est dans notre coeur. Il suffit tout simplement de se souvenir

Un article écrit par Isabelle Jeanpierre

Photos par Marï Photographe

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